De l’expérience client à l’expérience collaborateur
Parler d’expérience collaborateur, c’est l’assurance de pouvoir rédiger un post qui sera dans l’air du temps et dans lequel on trouvera à peu près tout ce qu’on veut. C’est le bonheur des buzzwords ou autre mot valise.
Toutes les idées du moment y trouvent leurs places et soyons sûr que de nombreux projets vont s’engager sur la base de ces deux mots simples.
Dois-je installer urgemment une table de ping-pong, mettre à disposition une salle de méditation ou organiser un barbecue sur le toit de mon entreprise ? Je vais certainement récolter un grand nombre de CV de jeunes diplômés et satisfaire pleinement mes collaborateurs. En fait, rien n’est moins sûr…
Ce ne sont pas non plus ces raisons qui ont poussées Mark Levy, DRH d’Airbnb à devenir leur Responsable de l’Expérience Collaborateur (ou Chief Employee Experience Officer). Leur intention est bien plus profonde et repose sur leur propre expérience interne.
Airbnb comme d’autres startups ont amené sur le devant de la scène les principes de customer centric, autre buzzword (il y en aura d’autre). Ici, c’est le client, l’utilisateur qui est analysé dans son rapport au service proposé. Une réponse adaptée, simple, ergonomique lui sera proposée pour simplifier son parcours client et ainsi optimiser son acte d’achat et le renouvellement de ses visites.
L’expérience collaborateur pose les mêmes principes. Le collaborateur est mis en centre de la réflexion. Le lien entre les deux approches est fort. Chaque étape de la vie du collaborateur comme le cycle de vie du client est prise en compte : de son recrutement à son départ mais aussi plus finement à chaque point de contact avec l’organisation, du moment où il arrive le matin au moment où il quitte l’entreprise le soir. Poursuivons notre définition par la négation, car là aussi, ce serait trop réducteur et une erreur de s’arrêter ici.
L’expérience collaborateur n’est pas uniquement le cycle de vie de l’employé. L’expérience collaborateur n’est pas la marque employeur ni la Proposition de Valeur Employeur (PVE). L’expérience collaborateur est une notion qui fédère car elle intègre et dépasse l’ensemble de ces concepts existants.
Au regard des informations factuelles ou plus affectives récoltées lors du recrutement, le collaborateur va juger la réalité de la promesse initiale. Par la suite, il pourra expérimenter dans son quotidien les écarts avec le projet d’entreprise, les moyens donnés pour atteindre ses objectifs.
L’expérience collaborateur représente, ainsi, la somme des perceptions, qu’elles soient bonnes ou mauvaises, que le collaborateur a des différents moments/expériences de son activité.
La marque employeur pose le contrat, l’intention qui passera dans le filtre de l’interprétation de chacun. L’expérience collaborateur, quant à elle, met l’humain au cœur de l’entreprise et en cela l’empathie joue un rôle central dans la relation employeur/employé.
Permettre à mes collaborateurs de jouer au baby-foot sur leur temps de pause ne prouvera pas de ma responsabilité sociale si dans le même temps un manager fustige le retard d’un collaborateur ayant passé la nuit au chevet d’un proche.
Il est évident que l’effet amplificateur de cet exemple sur le reste de l’entreprise sera important et générateur de mécontentement. Le discours ne suffit pas si mes collaborateurs ne sont pas en phase et portent un message contraire.
Finalement, pourquoi ce buzzword fait autant d’écho ? Parce que les enjeux sont énormes autant que variés.
L’Homme au cœur de la performance
Pour résumer simplement ces enjeux, tout en refaisant le lien entre expérience client et expérience collaborateur, nous pouvons reprendre cette phrase éclairante de Richard Branson “En mettant l’employé au premier plan, le client ira mieux et en fin de de compte l’actionnaire aussi”.
Des attentes non satisfaites ou en décalage avec la promesse initiale vont conduire à un appauvrissement en termes d’implication et de manière évidente, il y aura un coût pour l’entreprise.
S’engager sur la voie de l’expérience collaborateur impose très clairement de se réinventer totalement et redéfinir ce qu’est le travail. Les quatre générations qui occupent aujourd’hui le même espace de travail ont certainement des aspirations différentes.
Cependant pour chacune d’elle l’environnement évolue et nous recherchons tous à reprendre la main sur le temps. L’épanouissement personnel est une quête qui ne s’éteint pas en arrivant le matin au bureau.
En ouverture de la Fabrique du changement à Nantes en mai 2016, Laurence Vanhée exposait avec intensité son histoire personnelle : DRH du Service public fédéral belge de Sécurité sociale, elle a décidé de remplacer son titre de DRH par celui de « Chief Happiness Officer ».
Au-delà de la curiosité soulevée, de la finalité de sa nouvelle mission et de manière dont elle l’a concrétisé, le point de départ de cette décision est lié à un besoin personnel, la nécessité impérative de redonner du sens à sa propre vie.
De cette conviction profonde, naissent des résultats probants : un taux de satisfaction de 89%, une augmentation des candidatures spontanées a augmenté de 500%. Pour finir sur les chiffres de la performance, Laurence Vanhée explique ceci “Il est vrai qu’en matière de management un salarié heureux coûte beaucoup moins cher à son patron : il est deux fois moins malade, six fois moins absent, et 55% plus créatif qu’un salarié malheureux”.
L’enjeu est clair mais comment s’engager sur la voie de l’expérience collaborateur ?
Mettre de la cohérence
La cohérence en est le prérequis, son fil conducteur :
- Une cohérence entre ce que je suis à l’extérieur et dans l’entreprise,
- Une cohérence entre la promesse initiale à l’embauche et les premières expériences dans l’entreprise,
- Une cohérence entre le projet d’entreprise et la concrétisation opérationnelle,
- Une cohérence entre le discours du top management et du middle management.
Et ce n’est certainement pas exhaustif. En tant qu’employeur, mon rôle est d’être capable de créer les conditions adéquates pour assurer cette cohérence.
Comprendre, tester, faire des erreurs et apprendre !
Poursuivons notre parallèle : Quelles méthodes ont-été utilisées par les entreprises innovantes pour répondre aux nouveaux besoins des consommateurs ? Comment ont-elles pensé l’expérience client ?
En proposant un service avant de parler produit, elles ont proposé une approche globale.
Le Design de service (ou Design Thinking) a posé un référentiel permettant de guider la construction de ces nouvelles offres.
Cette démarche est tout à fait pertinente pour aborder la mise en place d’une expérience collaborateur. Sa grande force est de replacer l’utilisateur au cœur des préoccupations ; finalement et peut être surtout d’être une pratique du bon sens.
Le Design thinking, c’est faire preuve d’empathie, avoir une compréhension fine de tous les collaborateurs qu’ils soient décideurs, managers ou opérationnels. C’est ressentir, percevoir, comprendre leurs attentes, leurs volontés et leurs besoins.
Il faut poser clairement les enjeux généraux : quelle valeur dois-je apporter à mon collaborateur et quelle valeur ces nouveaux services vont apporter à mon entreprise ? Dès lors, les idées vont émerger spontanément.
Pour transformer les idées en solution pertinente et viable, il est essentiel de se lancer rapidement et de tester. Le service imaginé sera affiné au fil de l’eau par itérations successives. Intégrer l’ensemble des parties prenantes et démontrer par l’exemple sont les meilleurs moyens d’identifier tous les freins et leviers d’optimisation mais aussi implicitement d’assurer l’adhésion à ces changements.
N’ayons pas peur d’échouer : les meilleures idées sont issues des erreurs précédentes, c’est un principe clé des démarches d’innovation.
Organisation, espace de travail et digital
En identifiant les nombreux points de contacts que l’employé va avoir avec l’entreprise, je vais cartographier le service de l’expérience collaborateur. Chaque point de contact peut donner lieu à une optimisation.
Proposer un catalogue de solutions reviendrait à ériger les foodtrucks comme le nouveau standard de la relation employeur-employé ! Nous le tournerons plutôt sous forme de questionnement catégorisé par type de points de contact.
Point de contact avec l’organisation :
- Comment mon organisation simplifie le décloisonnement des rôles ?
Le point de départ de la réflexion est la prise en compte d’une donnée fondamentale : par notre volonté de rationaliser nos décisions, nous segmentons et faisons entrer chaque individu dans des catégories. Une personne est plus complexe et en cela plus riche. Dans une même journée, je peux être consommateur, manager, employé avec des besoins, des motivations et des résistances différentes à chaque fois.
- Comment j’assure l’identification et le partage des connaissances des anciens comme des nouveaux arrivants ?
L’onboarding ne concerne pas uniquement le collaborateur embauché mais implique l’ensemble de l’organisation. Un nouvel arrivant est une richesse à partager avec les employés en place.
- Quelles actions je mets en place pour dynamiser la coopération ?
Encore une évidence, la richesse ou le capital humain se valorise par la capacité à être intelligent ensemble.
- Est-ce que mon organisation hiérarchique est adaptée ?
Mettre en place une expérience collaborateur implique une réorganisation de la relation au travail. Par conséquence, les managers mais aussi les directions des ressources humaines sont engagés dans une transformation de leur rôle. Ce sujet est vaste et mériterait à lui seul un post !
Point de contact avec l’environnement physique
C’est certainement l’aspect le plus visible de l’expérience collaborateur. Nous l’avons dit à l’item précédent, un collaborateur a plusieurs rôles : que ce soit, le télétravail, les bureaux partagés ou autres aménagements de bureaux, la vraie question à se poser est celle-ci : mon espace physique de travail est-il suffisamment modulaire pour exercer efficacement mon métier sur ses différentes facettes ?
Point de contact avec les outils de travail
Donner une cohérence à un ensemble de paramètres aujourd’hui siloté est un enjeu majeur de l’expérience collaborateur. L’informatique d’entreprise est parfois bien éloignée de celle que nous utilisons dans notre quotidien. La diversité des outils, leur aspect disparate est un frein à l’engagement.
L’espace de travail digital doit lui aussi être pensé pour offrir une expérience collaborateur complète et adaptée. Le digital workplace est une opportunité, un moyen idéal pour apporter une cohérence générale.
Le champ des actions est vaste et prendre de front tous les sujets est illusoire. Alors, pour des résultats concrets et rapides, adoptons des réflexes agiles et lançons-nous sur des projets courts et collaboratif.
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